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Stellantis mise sur l'hybride : une stratégie agile mais coûteuse ?


Le logo de Stellantis

Le marché automobile européen traverse actuellement une période de profondes mutations, marqué par des incertitudes majeures. D'un côté, l'électrification, poussée par des réglementations strictes, peine à convaincre pleinement une partie des consommateurs, se heurtant à des freins tels que le coût d'achat, l'autonomie perçue ou encore les infrastructures de recharge. De l'autre, la concurrence s'intensifie, notamment avec l'arrivée de marques chinoises proposant des modèles électriques au positionnement tarifaire agressif. Dans ces eaux troubles, le groupe Stellantis a choisi d'adapter sa stratégie, misant désormais de manière significative sur l'hybride, une technologie dont l'attrait auprès des acheteurs ne cesse de croître ces derniers mois. Cette flexibilité, rendue possible par des plateformes techniques multi-énergies, semble porter ses fruits, bien qu'elle soulève également de nouveaux défis.



Le virage stratégique de Stellantis face aux réalités du marché électrique

Il y a encore peu de temps, Stellantis affichait une ambition claire et audacieuse : s'engager pleinement dans la transition vers la mobilité électrique. Le groupe avait même annoncé viser le 100 % électrique pour l'ensemble de ses gammes d'ici 2030, prenant ainsi cinq ans d'avance sur l'échéance fixée par l'Union européenne pour l'arrêt des ventes de véhicules thermiques neufs. Cette orientation stratégique forte semblait positionner le groupe comme un leader dans cette course à l'électrification.

Cependant, les chiffres de vente des véhicules électriques en Europe n'ont pas toujours suivi les projections les plus optimistes. Face à un ralentissement de la demande et une hésitation persistante des acheteurs, Stellantis a fait preuve de pragmatisme et a décidé de réorienter sa stratégie. L'objectif n'est plus de forcer le passage au tout électrique à marche forcée, mais plutôt de s'adapter aux attentes actuelles du marché en misant sur la polyvalence. C'est là que les plateformes techniques multi-énergies prennent tout leur sens. Conçues dès l'origine pour accueillir différentes formes de motorisation – électrique, hybride, essence ou diesel –, elles offrent une flexibilité industrielle précieuse. Cette approche permet à Stellantis d'ajuster rapidement sa production en fonction de la demande réelle des consommateurs pour chaque type de propulsion. Par exemple, la future plateforme STLA Small devrait continuer à proposer une large palette de motorisations. Cette capacité à ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier pourrait constituer un avantage certain pour Stellantis face à certains concurrents, notamment le groupe Renault, qui semble avoir misé plus lourdement sur le tout électrique. L'agilité de Stellantis lui permet de répondre plus directement aux fluctuations du marché et aux préférences variées des automobilistes européens.


Le succès de l'hybride, une victoire qui n'est pas sans défis

Le choix stratégique de Stellantis de rééquilibrer son offre électrifiée en accordant une place prépondérante à l'hybride semble largement justifié par les dynamiques actuelles du marché. En effet, les motorisations hybrides ont vu leurs ventes s'envoler ces derniers mois, devenant la technologie la plus vendue en Europe. Les consommateurs y voient souvent un compromis pertinent, offrant une réduction de la consommation et des émissions en milieu urbain grâce à l'apport de l'électrique, sans les contraintes liées à la recharge exclusive ou à l'autonomie limitée des véhicules 100 % électriques sur les longs trajets.


Fort de ses quatorze marques et d'une gamme étendue couvrant tous les segments, Stellantis a rapidement capitalisé sur cette tendance. Les résultats du premier trimestre 2025 témoignent de cette réussite : selon les données du cabinet indépendant Inovev, le groupe a écoulé pas moins de 194 858 voitures hybrides en Europe durant cette période. Ce chiffre le place largement en tête de ce segment, devançant Toyota de 67 000 unités et le groupe Renault de près de 100 000 unités. En incluant les véhicules utilitaires légers, le leadership de Stellantis sur l'hybride se confirme, avec près de 240 000 unités vendues. Jean-Philippe Imparato, directeur de Stellantis Europe élargie, a d'ailleurs souligné le succès de cette stratégie d'équilibre, citant l'exemple de l'Alfa Romeo Junior proposée à la fois en hybride et en électrique, contribuant au retour en force de la marque sur le marché.


Cependant, cette bascule rapide vers l'hybride, rendue possible par l'agilité industrielle de Stellantis grâce à ses plateformes multi-énergies, n'est pas exempte de conséquences inattendues. La demande subite et massive pour les composants spécifiques aux motorisations hybrides (batteries, moteurs électriques, systèmes de gestion) met sous tension la chaîne d'approvisionnement du groupe. Les fournisseurs, qui n'avaient peut-être pas anticipé cette inversion de tendance aussi marquée et rapide, peinent à suivre le rythme et à livrer les volumes nécessaires dans les délais. Ce déséquilibre entre une stratégie de production agile et des fournisseurs moins réactifs engendre des retards de fabrication pour certains modèles Stellantis. C'est la raison principale expliquant les délais de livraison parfois très longs constatés actuellement, notamment sur des modèles phares comme la Citroën C3 hybride et le Citroën C3 Aircross, très attendus sur le marché. Le succès de la stratégie hybride a donc un revers : des difficultés d'approvisionnement qui impactent directement la disponibilité des véhicules pour les clients.



L'agilité est incontestablement une vertu essentielle, particulièrement en ces temps incertains pour l'industrie automobile. Si l'on peut reprocher beaucoup de choses à Carlos Tavares, il faut lui reconnaître une certaine clairvoyance en n'ayant pas misé l'avenir du groupe exclusivement sur le tout électrique. La décision de pivoter et de renforcer l'offre hybride est parfaitement compréhensible au regard de la dynamique actuelle du marché et des chiffres de vente, plaçant Stellantis en position de leader européen sur ce segment. Néanmoins, cette adaptation rapide, aussi stratégiquement judicieuse soit-elle, n'est pas sans conséquence. Si Stellantis a démontré une capacité à s'adapter rapidement grâce à ses outils industriels, ses fournisseurs semblent avoir plus de mal à suivre cette inversion de tendance. Il en résulte des difficultés concrètes sur le terrain, notamment des retards de production et de livraison qui affectent directement les clients qui attendent leurs nouveaux modèles hybrides, y compris chez Citroën mais pas que. Le chemin vers la transition énergétique reste complexe, et même une stratégie agile rencontre ses propres obstacles.

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