[Les publicités Citroën] Citroën AX : l'histoire de la publicité "Révolutionnaire" sur la Muraille de Chine

Après avoir exploré les campagnes audacieuses de la Visa et de la CX GTi Turbo, la série sur les grandes publicités Citroën se conclut par un véritable chef-d'œuvre. En 1986, pour le lancement de sa nouvelle citadine, la Citroën AX, la marque aux chevrons ne s’est rien refusé. Elle a choisi un décor mythique, la Grande Muraille de Chine, pour une publicité qui, à l'image de son slogan, se voulait tout simplement "Révolutionnaire". Ce film publicitaire n'est pas seulement un coup de maître marketing ; il est le reflet d'une époque, d'une ambition et de l'esprit d'aventure qui a toujours caractérisé Citroën. Retour sur une saga publicitaire qui a durablement marqué les esprits et qui appartient aujourd'hui au patrimoine de la communication.

Le défi d'une citadine "Révolutionnaire"

Au milieu des années 80, Citroën se trouve à un tournant. La marque, portée par le succès de la BX, doit impérativement réussir le lancement de sa nouvelle petite voiture, l'AX. Conçue pour remplacer la Visa et la LNA, l'AX a pour mission de concurrencer les stars du segment, les Peugeot 205 et Renault Supercinq. Pour cela, Citroën dispose d'atouts techniques sérieux : la voiture est légère, son aérodynamisme est soigné (Cx de 0,31) et ses moteurs sont très sobres, ce qui lui vaudra des records de consommation. Mais pour imposer ce nouveau modèle, il faut plus que des qualités intrinsèques ; il faut un lancement spectaculaire. C'est ici qu'intervient Jacques Séguéla. Le célèbre publicitaire de l'agence RSCG, déjà auteur de campagnes mémorables pour la marque, sait que les années 80 sont à la démesure. Pour Citroën, il voit grand, très grand. L'idée est audacieuse : faire rouler la nouvelle AX sur la Grande Muraille de Chine, prolongeant ainsi l'héritage des grandes expéditions de la marque, comme la Croisière Jaune. Le message est clair : cette petite voiture est capable de grands exploits. Elle n'est pas seulement un véhicule économique, elle porte en elle un souffle d'aventure et d'innovation. Le slogan "Révolutionnaire" s'impose alors comme une évidence.

Une épopée publicitaire sur la Grande Muraille

Le projet, aussi brillant soit-il, relève du défi diplomatique et technique. Obtenir l'autorisation de tourner sur un monument aussi symbolique et protégé que la Grande Muraille de Chine est une première pour une entreprise occidentale. Après six mois de négociations acharnées et l'intervention du fils de Deng Xiaoping, le gouvernement chinois donne son feu vert. Avec un budget de trois millions de francs, une somme colossale pour l'époque, Citroën confie la réalisation du film à Raymond Depardon, photographe et documentariste de renom. Le tournage est une aventure en soi. Les voitures doivent être hissées sur la muraille à l'aide d'échafaudages en bambou, sur une section de la muraille présentant une pente de plus de 70%. L'anecdote la plus célèbre reste que la jeune mannequin au volant de l'AX n'avait pas son permis de conduire. Pour créer une illusion de vitesse, l'équipe a filmé à 12 images par seconde, permettant à la voiture, qui avançait en réalité au pas, de paraître fuser à toute allure une fois le film monté en vitesse normale. Le résultat est à la hauteur des ambitions : une image forte, celle d'une petite voiture agile défiant un monument millénaire, singeant les déambulations dans la jungle urbaine, et ce mot, "Révolutionnaire !", qui résonne comme une promesse. La publicité est un succès immédiat. Elle crée un immense capital de sympathie pour l'AX et entre directement au panthéon des publicités télévisées, associant pour toujours le modèle à l'audace et à l'aventure.

En conclusion, cette campagne pour la Citroën AX clôt cette série sur une note d'aventure et de spectacle. Elle est emblématique de la communication de Citroën à cette époque : créative, audacieuse et toujours capable de surprendre. En osant l'impossible, en mêlant l'héritage historique à une modernité décomplexée, Citroën et Jacques Séguéla n'ont pas seulement vendu une voiture ; ils ont vendu un rêve. Ces publicités, de la Visa "volante" à l'AX sur la Muraille de Chine, ne sont pas de simples réclames. Elles sont des courts-métrages qui ont marqué leur temps, gravés dans la mémoire collective et qui appartiennent aujourd'hui, sans aucun doute, à la grande histoire de la publicité. Elles rappellent une époque où l'on n'avait pas peur de voir grand pour raconter de belles histoires automobiles.