Airbags Takata : Pourquoi le gouvernement impose un "Stop Drive" uniquement à Citroën ?
- Jérémy
- 18 juin
- 4 min de lecture

L'histoire récente de Citroën semblait tracée sous le signe du renouveau, avec une identité forte et le lancement d'une gamme rajeunie. Pourtant, la marque aux chevrons se retrouve une nouvelle fois dans la tourmente, rattrapée par le scandale mondial des airbags Takata. Un tragique accident mortel survenu à Reims, impliquant une C3, a ravivé les inquiétudes et poussé le gouvernement français à prendre une mesure radicale. Le ministère des Transports a en effet exigé de Citroën la mise en place d'une procédure de "Stop Drive", ordonnant l'immobilisation immédiate de tous les modèles de C3 et DS 3 dont les coussins gonflables défectueux n'ont pas encore été remplacés. Si cette décision, motivée par la protection des automobilistes, est en soi compréhensible, elle soulève une question légitime et persistante : pourquoi Citroën est-elle la seule marque visée par une obligation aussi stricte, alors que le fléau des airbags Takata touche une part bien plus large de l'industrie automobile ?
Une réaction gouvernementale forte suite à un tragique accident
Le 11 juin dernier, un drame de la route à Reims a brutalement rappelé la dangerosité des airbags défectueux fournis par l'équipementier japonais Takata. La conductrice d'une Citroën C3 de 2015 a perdu la vie, non pas à cause de la violence du choc, mais à cause du déploiement de son airbag. L'autopsie a confirmé les pires craintes : le mécanisme a projeté des fragments métalliques, causant des blessures mortelles. Ce n'est malheureusement pas un cas isolé au niveau mondial, bien que la plupart des incidents recensés jusqu'ici concernaient des véhicules circulant dans des climats chauds et humides, réputés pour accélérer la dégradation du composant chimique à l'origine du problème. Face à l'émotion et à la confirmation du lien de cause à effet, la réaction des pouvoirs publics a été immédiate. Philippe Tabarot, sénateur et président du groupe d'études "Sécurité routière", a interpellé le ministre des Transports, qui a ensuite convoqué la direction de Stellantis. La sentence est tombée : un "Stop Drive" impératif pour les véhicules concernés encore en circulation.
Cette décision intervient alors même que Citroën est engagé depuis des mois dans une campagne de rappel d'une ampleur colossale. Xavier Chardon, le nouveau directeur de Citroën France, a rappelé sur TF1 que la marque avait "agi de manière très forte" bien avant cette injonction. Sur les 690 000 Citroën C3 et DS 3 initialement concernées en Europe et au Moyen-Orient, plus de 480 000 ont déjà été traitées. L'ordre du gouvernement vise donc les 209 000 exemplaires restants, pour lesquels la marque peine à joindre les propriétaires actuels. C'est un coup dur pour l'image de Citroën, qui avait déjà souffert de la communication initiale sur cette affaire au moment de l'arrivée de sa C3 de quatrième génération.
Citroën en première ligne, mais loin d'être un cas isolé
La focalisation des autorités sur Citroën a de quoi surprendre. Si la sécurité des conducteurs des 209 000 véhicules restants est une priorité absolue et non négociable, le danger que représentent les airbags Takata n'est absolument pas exclusif aux modèles de la marque. En réalité, ce scandale est l'un des plus vastes de l'histoire automobile, touchant des dizaines de constructeurs et des millions de véhicules à travers le monde. Le problème réside dans le propergol à base de nitrate d'ammonium utilisé par Takata, qui peut devenir instable avec le temps, surtout sous l'effet de la chaleur et de l'humidité, et exploser de manière incontrôlée.
La liste des marques ayant équipé leurs modèles avec ces dispositifs potentiellement mortels est longue et inclut des noms prestigieux et populaires. On y retrouve notamment Ford, Honda (l'un des constructeurs les plus touchés en volume), Toyota, Nissan, Mazda, BMW, Audi, Volkswagen, Skoda, Seat, et bien d'autres. Tous ces constructeurs ont lancé leurs propres campagnes de rappel à l'échelle mondiale, avec plus ou moins de succès et de proactivité. La question demeure donc : pourquoi imposer une mesure d'immobilisation, coercitive et très médiatisée, uniquement à Citroën ? Il est probable que l'actualité récente et le drame de Reims aient joué un rôle de catalyseur, plaçant la C3 sous le feu des projecteurs. Cependant, le danger théorique est rigoureusement le même pour le propriétaire d'un autre véhicule de la même époque équipé du même airbag.
L'affaire Takata continue d'être un héritage empoisonné pour Citroën. Malgré les efforts logistiques et financiers considérables déployés pour contacter les propriétaires et remplacer les pièces défectueuses, la marque se voit imposer une mesure qui entache, une nouvelle fois, sa réputation. Il est indéniable que tout doit être mis en œuvre pour sécuriser les voitures potentiellement dangereuses et que l'objectif de "zéro risque" est louable. L'injonction de "Stop Drive" va dans ce sens en créant un électrochoc nécessaire pour les propriétaires qui n'auraient pas encore répondu aux sollicitations.
Néanmoins, cette obligation faite de manière exclusive à Citroën pose légitimement question sur l'équité de traitement au sein de l'industrie automobile face à un risque partagé. Cette situation donne l'impression que la marque aux chevrons porte seule le poids d'une crise dont la responsabilité originelle incombe à un équipementier et qui affecte l'ensemble du secteur. Pour les passionnés comme pour les clients de la marque, il est essentiel d'espérer que cette focalisation médiatique et politique ne soit qu'une première étape et qu'une approche plus globale sera rapidement adoptée pour garantir la sécurité de tous les automobilistes, quelle que soit la marque de leur véhicule.
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